La Banque européenne d’investissement (BEI) a annoncé jeudi qu’elle cesserait de financer de nouveaux projets liés aux énergies fossiles, y compris le gaz, à partir de 2022. Une décision saluée pour sa contribution à la lutte contre le changement climatique.
La décision est « historique », selon le ministre de l’Économie français Bruno Le Maire. C’est « un bond de géant« , pour le président de la Banque européenne d’investissement (BEI) Werner Hoyer. « Nous allons arrêter de financer les énergies fossiles et nous allons lancer la plus ambitieuse stratégie d’investissements pour le climat de toutes les institutions financières publiques dans le monde », a ainsi annoncé Werner Hoyer jeudi 14 novembre. Dès juillet, la BEI avait préconisé de ne plus investir dans les projets liés aux énergies fossiles, y compris le gaz. Mais il fallait attendre le blanc seing de son conseil d’administration, composé de représentants des États membres et de la Commission européenne. C’est chose faite.
Le gaz conventionnel au centre des débats
La discussion a cependant été « longue« , reconnait le vice-président de la BEI Andrew McDowell. Plusieurs ONG ont dénoncé les hésitations autour de l’inclusion des projets liés au gaz, la moins émettrice en CO2 des énergies fossiles. Mais jeudi, la Commission européenne a soutenu la nouvelle politique de la BEI, et s’est dit satisfaite d’un « arrangement transitoire pour l’abandon progressif des projets gaziers, y compris les projets vitaux d’interconnexion et de stockage de gaz, les projets dits d’intérêt commun« .
Fin 2021, la BEI va ainsi introduire une norme de « performance« , soit un seuil d’émissions fixé à 250 grammes de CO2 par kilowattheure. Tous les futurs projets devront s’y conformer pour être approuvés. Or, cette limite évince les projets gaziers conventionnels selon la BEI. Seul le recours à des gaz « verts » ou des technologies avancées de stockage de carbone par exemple permettraient de répondre à ce critère, estime la banque. Un seuil toutefois jugé « trop élevé » par l’organisation WWF, qui estime qu’il permet à des centrales à gaz performantes d’être éligibles.
Banque du climat
Outre l’annonce phare sur les énergies fossiles, la BEI espère « débloquer » jusqu’à 1 000 milliards d’euros d’investissements dans l’action pour le climat et le développement durable au cours de la prochaine décennie. Selon Andrew McDowell, un euro sur deux investi par la BEI d’ici 2025 sera dédié à des projets environnementaux.
Ces annonces apparaissent comme des premiers pas vers la banque du climat que la future présidente de la Commission européenne, Ursula von der leven a appelé de ses voeux Il s’agit ainsi d’aligner la politique d’investissement de la BEI sur les engagements pris lors de la signature de l’Accord de Paris sur les réductions d’émissions de gaz à effet de serre. « Cette décision confirme que l’Union européenne se dote de moyens financiers à la hauteur de ses ambitions climatiques et doit créer une dynamique au niveau mondial« , s’est ainsi félicité Bruno Le Maire, rappelant le soutien du président Emmanuel Macron à la mue de la BEI. La France est même « prête à augmenter sa participation au capital pour servir cette ambition« , a-t-il renchéri dans un entretien au quotidien Les Echos.
Vers un nouveau standard ?
La décision a été saluée par plusieurs ONG, même si elle reste jugée trop « tardive » face aux enjeux climatiques. « Enfin, la plus grande banque publique du monde s’est pliée à la pression du public et a reconnu que le financement de tous les combustibles fossiles doit cesser« , a réagi Colin Roche, de Friends of the Earth, appelant toutes les autres banques, privées et publiques, à s’en inspirer. Sur le charbon, c’est encore loin d’être le cas pour tous les acteurs financiers français, selon un rapport du 14 novembre 2019 de la branche française des Amis de la Terre.
« C’est aussi un appel clair à ce que tous les fonds de l’UE emboîtent le pas et excluent toutes les activités qui aggravent le changement climatique des possibilités de financement« , a ajouté Markus Trilling, de Climate Action Network.
Selon Greenpeace et WWF, 19 États membres ont soutenu la nouvelle politique, y compris la France et l’Allemagne. Le manque de flexibilité sur le gaz a refroidi plusieurs pays qui ont voté contre ou se sont abstenus. Toujours selon ces organisations, l’Autriche et le Luxembourg se sont abstenus pour protester contre l’inclusion du nucléaire dans cette nouvelle politique.
Avec Novethic