Pour la célébration de la Journée Mondiale de l’Environnement 2023, la communauté internationale a choisi comme thème : solutions à la pollution plastique.
Aujourd’hui, le plastique a envahi notre quotidien. Il a remplacé les matériaux de base tels que le verre, le fer et le bois de par sa robustesse, sa capacité à épouser toutes les formes et couleurs, son moindre besoin énergétique et son faible coût. De nos jours, le plastique se retrouve partout : gaine de fils électriques, tuyaux d’évacuation et d’amenée des eaux, sièges de véhicules, coques de téléphones portables et d’ordinateurs, lunettes, matériel médical, … Donc, il faut reconnaitre que nous avons absolument besoin du plastique, mais ce dont nous n’avons pas besoin, ce sont les déchets plastiques surtout au niveau de nos pays où les sachets plastiques de faible micronnage à utilisation unique ont fini de nous envahir !!!
Déchets plastiques : de la pollution environnementale à la pollution sanitaire
Les déchets plastiques sont aujourd’hui considérés comme un « fléau » qui s’abat sur notre planète. D’après les études, le monde produit 350 millions de déchets plastiques par an dont 150 se retrouvent dans les espaces maritimes (océans, rivières, etc.). Au Sénégal, 250 mille tonnes de déchets plastiques sont produites par année. Les déchets plastiques se dégradent à l’air libre (photo-dégradation conduisant à la production de micro-plastiques), contaminant ainsi les sols avec un impact sur la biodiversité (perte de la faune végétale et/ou animale) et la santé des sols. Cela peut entraîner une baisse de la productivité agricole et menacer la sécurité alimentaire à long terme. Les déchets plastiques se retrouvent également dans les eaux où ils y subissent le même phénomène de dégradation, conduisant là aussi à la consommation des micro-plastiques par les poissons, la perturbation du plancton, à la diminution de la reproduction des poissons, …
Conséquence, depuis quelques années, un nombre croissant d’études scientifiques soulignent la présence de micro-plastiques dans la chaîne alimentaire dont l’impact sur notre santé est encore peu connu.
Devant cette menace grandissante, l’ONU propose d’éradiquer la pollution causée par les plastiques dans les écosystèmes aquatiques et terrestres.
Mettre fin à la pollution plastique : vers un instrument international juridiquement contraignant
Pour cela, un comité intergouvernemental de négociation (CIN) a été mis en place par l’ONU avec pour mission d’éradiquer la pollution plastique. Ce CIN a tenu sa première réunion en novembre 2022 à Punta del Este (Uruguay). La deuxième réunion, qui vient de se terminer à Paris (du 29 mai au 2 juin 2023) a vu la participation d’un millier de délégués de 175 pays et plus de 1 500 scientifiques et représentants de la société civile et de l’industrie.
Si le constat est unanime, les solutions divergent selon les intérêts des uns et des autres. D’aucuns prônent pour des obligations et des mesures de contrôle sur l’ensemble du cycle de vie des plastiques (de l’extraction du pétrole dont est issu le plastique, la production, la fabrication, l’utilisation, le recyclage et élimination), d’autres proposent le recyclage, l’innovation et une meilleure gestion des déchets plastiques.
Le Sénégal, en sa qualité de futur producteur de pétrole qui, nous l’espérons, a pour ambition de transformer le pétrole pour produire du plastique, devrait logiquement rejoindre le groupe 2 qui prône le recyclage, l’innovation et une meilleure gestion des déchets. Pour pouvoir performer autour de ces trois objectifs, cela nécessite que nous ayons des équipes de recherche compétitives sur le sujet. Ce qui est le cas pour plusieurs groupes de recherche travaillant dans la physique des matériaux dans nos universités … mais faudrait-il que nos décideurs les impliquent dans les prises de décision.
Des solutions envisageables au Sénégal…
Des solutions sont envisageables dans le cadre de l’économie circulaire où le déchet plastique est considéré comme une matière première avec à la clé la création de milliers d’emplois décents et durables (de la collecte à la distribution en passant par la transformation). Par exemple, l’une des dernières thèses issues de l’équipe du LRNA de la Faculté des Sciences et Techniques de l’UCAD a montré qu’il est possible de fabriquer des composites pour la fabrication des matériaux de construction en utilisant des déchets plastiques mélangés à des résidus agricoles appelés des composites. L’autre variante serait d’ajouter au mélange de l’argile pour fabriquer des nano-composites dont les opportunités pour la fabrication de produits finis servant dans plusieurs domaines ne sont plus à démontrer : pneus de voiture, textile, emballage, matériaux de construction, …
Une autre solution envisageable, tout de suite et maintenant, serait de ramasser les déchets plastiques et les pneus usés disséminés dans nos villes pour en faire des aménagements pour les populations comme nous avons eu à le faire pour les étudiants dans le bois sacré et le jardin de la Faculté de Médecine, Pharmacie et Odontologie de l’UCAD, à la direction du cadre de vie à Cambérène, …
Pr Adams TIDJANI
Directeur de L’Institut des Métiers de l’Environnement et de la Métrologie, IMEM