Les négociations sur les marchés du carbone sont dans une impasse à la COP 29, à seulement quelques heures de la fin. C’est un secret de polichinelle de dire que les répercussions pour l’Afrique d’un mauvais accord seraient négatives. Pourquoi ? Parce que pour nombre d’observateurs avertis, les règles qui régissent les échanges de crédits carbone entre les pays signifieraient que des accords de mauvaise qualité à l’avenir seraient totalement opaques et sans aucune responsabilité.
Pour l’Afrique, cela pourrait aggraver la crise foncière, avec des nations riches se précipitant pour acheter des terres afin de les aider à atteindre leurs objectifs climatiques. « Les projets de production de crédits carbone ne neutralisent pas les émissions des entreprises polluantes qui les achètent. En pratique, cela permet aux pollueurs de continuer à polluer tant qu’ils peuvent jeter des miettes aux communautés et aux pays en première ligne de la crise », a déclaré Amos Wemanya, Responsable principal – Greenpeace Afrique.
Les règles qui définissent ce qui constitue une bonne élimination du carbone dans le cadre de la CCNUCC (article 6.4 de l’article 6) ont été adoptées de manière controversée à Bakou le jour de l’ouverture de la COP 29. Les négociations avaient échoué à Dubaï en raison de désaccords entre les parties sur des décisions clés telles que le degré de transparence des marchés et les normes de qualité auxquelles les crédits échangés doivent satisfaire, explique un communiqué du GSCC parvenu à espacedev.
Lors du sommet des dirigeants mondiaux à Bakou, plusieurs dirigeants africains ont évoqué les avantages des marchés du carbone et se sont félicités de l’adoption de l’article 6, paragraphe 4. Toutefois, note notre source, l’échange de droits d’émission de carbone et ses avantages pour l’Afrique suscitent des inquiétudes. Pour illustrer son propos, elle souligne qu’il “existe des exemples clairs de la manière dont le commerce du carbone a privé les communautés africaines de leurs droits tout en profitant aux pollueurs historiques et en leur donnant des permis pour continuer à polluer”.
Cette note souligne le problème que posent l’article 6.2, qui doit encore être adopté, et l’article 6.4, récemment adopté, de l’accord de Paris, et explique pourquoi l’adoption de ces articles, tels qu’ils sont actuellement formulés, est problématique.
Qu’est-ce que l’article 6 ?
– L’article 6 (A6) est un élément clé de l’accord de Paris. Il vise à finaliser les règles sur la façon dont les pays et les entreprises peuvent utiliser les marchés du carbone gérés par les Nations unies pour réduire leurs émissions et atteindre leurs objectifs climatiques ;
– L’article 6 permet aux pays de coopérer volontairement les uns avec les autres pour atteindre les objectifs de réduction des émissions fixés dans leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) par le biais du transfert de crédits carbone ;
– Les négociations se sont étalées sur plusieurs années et le manque de clarté qui en résulte signifie que l’A6 est déjà utilisé à mauvais escient. Des objectifs concurrents signifient qu’au lieu de contribuer à ralentir le changement climatique, l’A6 pourrait en fait permettre aux pays de s’en tirer avec des réductions d’émissions inadéquates.
Les négociations au titre de l’article 6 se déroulent selon deux axes principaux :
● L’article 6, paragraphe 2, définit les règles et les normes applicables aux échanges de crédits carbone entre pays dans le cadre d’accords bilatéraux. Ce marché en est déjà à ses débuts, les pays signant des accords d’intention pour acheter des types spécifiques de crédits les uns aux autres. Pour que ces accords soient légitimés et respectent le protocole des Nations unies, les règles relatives à leur transparence et aux normes que les crédits doivent atteindre et doivent être finalisées lors de la COP29.
● L’article 6, paragraphe 4, fixe les règles et les normes d’un nouveau marché mondial du carbone sur lequel tout le monde peut acheter des crédits (il s’agit essentiellement d’une version du marché volontaire du carbone régie par les Nations unies). Un « organe de surveillance » est chargé d’élaborer les règles et de présenter les progrès accomplis aux pays lors de la COP29. Ce marché ne pourra devenir opérationnel que si les pays se mettent d’accord sur les principes de base qu’une bonne élimination du carbone doit respecter, par exemple le caractère permanent de l’élimination ou les dispositions en matière de droits de l’homme.