Sikilo, le poids des mesures

Ceux qui se préoccupent véritablement de sécurité ne sont pas du tout surpris par la survenance de ce drame. Il y a tout un ensemble de facteurs, à la fois, concordants et antinomiques pour expliquer que tels accidents sont la conséquence logique de l’incurie de l’administration centrale et de la dépravation généralisée des moeurs et mentalités dans ce pays. Combien faudra-t-il de deuils nationaux pour nous amener à constater de visu le  spectacle permanent de l’exposition de nos vies à des catastrophes récurrentes.

Nulle part dans le monde un 1er record mondial de morts suite à une catastrophe industrielle ayant une cause ne figurant plus dans les annales de la technologie, reste sans enquête a posteriori ni, a fortiori, sans responsable aucun.

Bis repetita, un second record mondial ayant entraîné la mort de près de 2000 pauvres personnes pauvres car aucun membre de famille de en haut de en haut, ni de famille de doomou sokhna est resté sans incrimination aucune.

Je sais qu’il y a des responsabilités identifiables et incontestables.

Pourtant l’arsenal juridique est très fourni. Mais quand on ferme les yeux sur plus de 2500 morts après 2 accidents, quand on ferme les yeux sur plus 750 morts sur la route suivies, chaque année, de plus de 2000 morts victimes d’accidents après leurs blessures et autres dommages corporels, on ne peut pas voir les surcharges dans des cars rapides, dans des bus interurbains. On ne peut pas voir les ferrailles sur des caoutchoucs noirs avec de pauvres bougres insouciants, on ne peut plus voir un papa, avec sa chère et douce moitié, un enfant sur le dos avec son frère ou sa soeur debout, tous sur un scooter, empruntant allègrement l’autoroute. Les populations sont convaincues que l’inconfort et l’insécurité dans lesquels elles trouvent leur bonheur sont des normalités que seuls, selon eux, des frustrés comme moi auront l’outrecuidance de remettre en cause. Nous sommes formatés pour accepter l’inacceptable. À tel point que pour partir de Dakar à Rufisque, 26 kilomètres, toutes sortes d’incantations sont faites pour arriver à bon port quel que soit le moyen de se déplacer. Le plus petit déplacement est un péril. On s’en est accommodé. Dieu, lui, veille et nous donne une piqûre de rappel en augmentant de manière spectaculaire, la gravité d’un des accidents dont la fréquence nous indiffère au même titre que les nombreuses pertes de vies humaines au moment de l’accident ou quelques jours, semaines ou mois après l’accident. La banalisation de tels drames en est arrivée à un point tel que les premiers témoins continuent leur chemin ou s’arrêtent pour prendre des photos alors que leur smart phone pourrait servir à appeler des urgences ou à géolocaliser le sinistre.

L’effroyable froideur de notre attitude face aux dangers nous amène à nous soucier des accidents qu’une fois qu’ils auront fini de clôturer leur bilan.

Ce qui se passe avant est surérogatoire et dépasse notre entendement. Les feux rouges inexistants ou non respectés, les panneaux de signalisation vendus à la ferraille, les pneumatiques ramassés dans les déchèteries, les transports de voyageurs sous des tas de marchandises… sont devenus invisibles. Paradoxalement, L’État dépense tellement d’argent mais a démissionné de son monopole d’organiser la contrainte tout simplement.

Le problème que représente l’insécurité routière ne s’explique que par l’absence de leadership à savoir de décideurs qui réfléchissent avant tout et qui n’agissent qu’après avoir bien réfléchi et envisagé la meilleure décision avant de faire quoique ce soit. La rapidité avec laquelle les recommandations qui sont répétées à l’avènement de chaque primature  est éloquente de cette absence de réflexion. À part MA recommandation, dont je revendique la paternité, de créer une BRIGADE NATIONALE DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE,  OUI, C’EST MOI QUI L’AI PROPOSÉE DEPUIS PLUS D’UN AN, tout le reste nous est servi chaque fois qu’un accident grave s’est produit.

L’impréparation est telle que, voulant augmenter l’âge minimal pour le permis de catégorie D, ils l’ont fait passer malencontreusement, de 30 à 25 ans.

On a l’impression que les périls inhérents à l’insécurité routière ne peuvent se produire que sur les routes nationales. Quid des charrettes qui transportent des bombonnes de gaz, des remorques et semi-remorques qui empruntent des autoponts, des véhicules qui occupent les trottoirs empêchant les piétons de vaqueren sécurité à leurs besoins.  Au lieu de favoriser des voyages la nuit bien contrôlés, bien sécurisés, sur des routes moins encombrées, on les interdit. Voilà qu’on dispense de visites techniques pendant 3 mois des véhicules particuliers qui font du transport clandestin de personnes, les war Gaïnde, parce qu’ils font la course sur nos routes pour faire le plus de voyages entre Thiès et Dakar ou Mbour et Dakar. Sans assurance. Oui car dès lors qu’on perçoit un centime en contrepartie de l’obligation de résultat de déplacer une personne d’un point à un autre  on fait du TPV, transport public de voyageurs avec une couverture différente de celle des véhicules de monsieur tout le monde.

Le défaut d’assurance est un délit sévèrement réprimé. Il ne devrait souffrir d’aucune mansuétude. J’ai l’habitude d’expliquer qu’il ne s’agit pas d’une assurance du véhicule. C’est la responsabilité civile du propriétaire du véhicule qui est garantie pour tout dommage matériel ou corporel causé à des tiers poenitus exteanei, totalement étrangers au propriétaire, lui et à sa famille. Les conséquences pécuniaires pouvant résulter d’un accident ne pouvant être prévisibles et, corrélativement, supportables dans leur plénitude, la collectivité donne le véhicule financier permettant d’éviter de laisser des agents économiques,  des pères de famille, des mères de famille, des enfants…dans le dénuement total du fait des errements de conducteurs ou de préposés à la conduite. L’assurance est un facteur majeur de la sécurité financière. Aussi ne doit-elle pas être permissive. Elle ne doit pas être donnée n’importe comment et à n’importe qui et à n’importe quelle condition. Des véhicules que leur état ne permet pas de circuler ne doivent pas être assurés.

Un demandeur d’assurance multi récidiviste, accidenteur invétéré, ne doit pas être assuré. Les assureurs ont aussi leur part de responsabilité car ils doivent assumer leur rôle de prescripteurs de sécurité.

Aura-t-on jamais le courage de faire les ruptures inévitables?

Croisons les doigts.

Youssoupha Diop

youssouf.diop@gmail.com

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