Intégration économique régionale en Afrique de l’Ouest : Comment sortir de l’impasse (Suite)

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Intégration économique régionale en Afrique de l’Ouest : Comment sortir de l’impasse (Suite)

La CEDEAO et l’UEMOA avaient suscité beaucoupd’espoirs au regard des différents défis qu’elles devaient relever et des objectifs qu’elles s’étaient assignées.

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) portée sur les fonts baptismaux en mai 1975, avait provoqué un regain d’enthousiasme en raison du nombre de pays concernés, de la taille de la population globale, du schéma institutionnel et aussi du profil des Chefs d’Etat signataires du Traité.

En effet, composée à la création de 15 pays de l’Afrique de l’Ouest dont la Mauritanie qui en est sortie en 2000, la CEDEAO comptait une population de 120 millions d’habitants en 1975, soit 25% de la population africaine. Aujourd’hui avec toujours 15 Etats membres car le Cabo Verde a rejoint en 1976, la population actuelle est de 460 millions d’habitants soit 27% de la population africaine. 

Aux termes du Traité de la CEDEAO, le  but  de  la  Communauté  est  de  promouvoir  la  coopération  et  le développement  dans  tous  les  domaines  de  l’activité  économique,  particulièrement  dans  les  domaines  de  l’industrie,  des  transports,  des  télécommunications, de  l’énergie,  de  l’agriculture,  des  ressources  naturelles,  du  commerce,  des  questions  monétaires  et  financières  et  dans  le  domaine  des  affaires  sociales  et  culturelles  avec  pour  objectif  d’élever  le  niveau  de  vie  de  ses  peuples,  d’accroître et de maintenir la stabilité  économique,  de renforcer les relations  entre  ses  membres  et de  contribuer au  progrès  et  au  développement  du  continent  africain. »

Sur les 15 Etats signataires du Traité du 28 mai 1975, 08 étaient dirigés par des militaires ou anciens militaires. D’ailleurs, les initiateurs du Projet CEDEAO Yakubu GOWON du Nigéria et Gnasingbe EYADEMA du Togo sont des militaires. C’est dire que la corrélation faite par certains entre le statut des Chefs d’Etat actuels du Burkina, Mali et du Niger et leur position sur la CEDEAO est dénué de sens.

La révision du Traité intervenue le 24 juillet 1993 a élargi le champ d’application aux questions de démocratie, de droits humains, de paix, de sécurité régionale et de gouvernance politique, de coopération monétaire, de transparence. La coordination des politiques a été étendue aux secteurs de l’environnement et les ressources naturelles, aux Sciences et technologies, à la culture et aux sociales.

La révision de 1993 marque ainsi une transformation majeure de la CEDEAO et reflète les défis contemporains de la région ouest-africaine, combinant intégration économique et développement durable avec sécurité et gouvernance démocratique.

L’adoption le 10 décembre 1999 du Protocole relatif à un dispositif destiné à assurer la sécurité et la paix collectives et dénommé « Mécanisme de Prévention, de Gestion, de Règlement des Conflits, de Maintien de la Paix et de la sécurité est la traduction concrète de cette orientation.

Le Protocole additionnel sur la Démocratie et la Bonne gouvernance du 21 décembre 2001 complète le Protocole relatif au Mécanisme de Prévention, de Gestion, de Règlement des conflits, de Maintien de la paix et de la sécurité.

Après plus d’une décennie d’ajustement structurel, la dévaluation inéluctable du Franc CFA conduisit à la création de l’UEMOA en janvier 1994 pour permettre la viabilité de l’intégration monétaire à travers l’intégration économique et l’unification des marchés nationaux.

En effet, les effets combinés des sècheresses des premières années de la décennie 70 et les chocs pétroliers de 1973 et 1979 ont plongé les Etats Ouest africains dans une crise profonde avec des déficits budgétaires considérables anéantissant ainsi les ambitions placées dans les processus d’intégration qui étaient en cours.

Le seul salut pour les Etats était le recours à l’aide extérieur et notamment aux institutions multilatérales, à une  succession de programmes de stabilisation, d’ajustement à court ou à moyen terme avec une réduction sans précédent des dépenses publiques notamment celles à vocation sociale et des privatisations ou restructurations tous azimuts.

Il s’en est suivi dans tous les pays des crises sociales et politiques graves ayant entrainé dans la plupart des cas des bouleversements institutionnels ou même des coups d’Etat.

Le recours à « l’ouverture démocratique » avec l’onction des anciennes puissances coloniales (Sommet de la Baule- juin 1990) et la Communauté internationale, l’organisation de « Conférences nationales » n’ont pas suffi face à la détérioration continue de la situation économique et sociale des pays ouest africains.

La chute de la compétitivité, l’appréciation continue des taux de change effectifs réel conduisait ainsi à l’ajustement monétaire tant redoutée, plusieurs fois reporté qui finissait par s’imposer aux pays ayant en commun le Franc CFA.

Avant de procéder à cette dévaluation de 50% du FCFA, le 12 janvier 1994, les Etats d’Afrique de l’Ouest, membres de la Zone franc, ont pris le soin de créer l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) le 10 janvier 1994 qui comprend les mêmes membres que l’UMOA mise en place en 1962. L’objectif étant de mettre en place un marché commun et de procéder aux réformes permettant d’accroitre la compétitivité des Etats membres grâce aux politiques sectorielles et aux réformes afin de soutenir la monnaie.

Evidemment cette démarche est cohérente car elle résulte des leçons tirées de l’existence d’une zone monétaire dépourvue de dispositifs de coordination ou d’harmonisation des politiques macroéconomiques et sectorielles.

Les Etats de l’Afrique centrale, membres de la Zone Franc feront de même le 16 mars 1994 en créant la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEMAC).      

Sans préjudice des objectifs définis dans le Traité de l’UMOA, l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) poursuit, dans les conditions établies par son Traité, la réalisation des objectifs ci-après :

  • renforcer la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d’un marché ouvert et concurrentiel et d’un environnement juridique rationalisé et harmonisé ;

     –   assurer la convergence des performances et des politiques économiques des Etats membres par l’institution d’une procédure de surveillance multilatérale ;

  • créer entre les Etats membres un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d’établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée, ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune ;
  • instituer une coordination des politiques sectorielles nationales, par la mise en œuvre d’actions communes et éventuellement de politiques communes notamment dans les domaines suivants : ressources humaines, aménagement du territoire, transports et télécommunications, environnement, agriculture, énergie, industrie et mines ;
  • harmoniser, dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché commun, les législations des Etats membres et particulièrement le régime de la fiscalité.

Serigne Mbacké SOUGOU

Economiste-Expert Fiscal

Ancien Représentant Résident de la Commission

de l’UEMOA au Niger

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